les motivations et les effets de nos communications virtuelles sur nos vies.
Téléphone, mails, visiophonie, sms, mms, chats, réseaux sociaux, forums, sites de rencontres, jeux multi-joueurs… Les mal-entendus d’échanges qui se passent de la présence de l’autre.
Cette rencontre proposait de nous questionner sur les motivations et les effets de nos communications virtuelles sur nos vies.
Alors qu’elles nous coupent de la majorité des informations sur la personne avec qui nous communiquons, qu’elles empêchent l’empathie, et que la plupart du temps nous le savons bien, ces façons de « se parler » remplacent de plus en plus la communication en face à face y compris avec nos proches.
Quand l’autre n’est pas en face de moi quand je m’adresse à lui, est-ce que je « lui envoie » la même chose qu’en sa présence ? Comment réagissons-nous à une communication dénuée de tout contexte et de tout affect. Par exemple, après trois semaines sans nouvelle de quelqu’un, je reçois un sms : « ciné 20h ? » ? Ou, exemple grotesque pour illustrer mon propos : comment aurais-je réagi à ma naissance si pour tout premier contact ma mère m’avait envoyé le sms suivant « Bjour mon chéri, tro cool té la. Biberon frigo. Lol ! tamerkitem » ? Qu’est-ce que m’épargne la communication virtuelle ? Comment la présence de beaucoup d’amis sur les réseaux sociaux rend t’elle heureux ou malheureux ? Ai-je toujours envie de rencontrer quelqu’un quand je communique virtuellement fréquemment avec lui ? Les sites de rencontre me font t’ils rencontrer des personnes différentes que dans ma vie de tous les jours ?
Les faits saillants de la soirée :
- La violence silencieuse d’une rupture par sms laisse sans mot.
- Je rentre en lien par sms comme je peux, par fainéantise, pour combler le vide.
- La décision de rompre une relation amicale par « communication virtuelle » peut être précédée, de longue date, d’une décision organiquement ressentie et non exprimée en présence de l’autre.
Facebook : de la communauté virtuelle à la Haine – Angélique GOZLAN
Extraits :
« Les individus se fondent dans le collectif, perdant « le sentiment de leur limite individuelle » (Freud, 1921). En ce sens, il apparaît sur Facebook des phénomènes de suggestibilité, de contagion, de toute puissance et d’exhalation des affects positifs ou négatifs envers une personne ou un idée »
(…)
« La particularité de ces communautés virtuelles est que la machine virtuelle (ensemble contenant-contenu) se place comme médiateur de la relation aux autres membres. Il n’existe pas de relation directe, et rarement de relation duelle. La rencontre avec l’autre et notamment avec l’autre sexe est médiatisée, permettant une maîtrise de l’objet alors même qu’il est menaçant à l’adolescence. Il y a donc dans ces communautés virtuelles une absence de corps charnel. Le corps ne se voit qu’à travers les images postées, mais il restera, de ce fait, toujours à distance, sauf dans quelques cas de mise à vue de corps sexualisés. Il n’y a plus de face à face mais une multitude de faces, avec cette spécificité que « les mouvements de chaque individu y sont commandés par ceux de l’ensemble. Dans une communauté, tous sentent et pensent de la même façon (Leroux, 2010). La communauté suscite alors un lieu d’indifférenciation. Ceci n’est pas anodin dans le contexte du moment adolescent. L’adolescent trouve en Facebook un lieu où le corps génital est mis à distance, ne se voit pas, (…) un lieu où « nous sommes tous identiques » au moment de l’inévitable séparation-individuation (Blos, 1967), pointant là une fuite de la réalité »
(…)
« Cette illusion est relayée par le fait que Facebook propose d’être tous amis, quelles que soient les origines, la culture, les frontières. J. Batout pose l’hypothèse que la réussite mondiale de ce site réside dans « cette absence institutionnalisée du conflit ». Il précise que « toute manifestation conflictuelle y est méthodiquement stérilisée, neutralisée », mais pour faire retour sur « un mode violent de règlement de différends » (Batout, 2011), la suppression radicale. En effet, nous ne pouvons instaurer que des liens d’amitiés voire de couple. Si un ami devient gênant, il suffit de le « supprimer », ou de le « bloquer » pour ne plus avoir de lien virtuel avec lui »
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« Pour autant, sur Facebook, il est possible d’aimer ce qui promulgue de la haine.(…) D’un statut ou d’une photographie postée sur Facebook peut émerger une véritable déferlante de haine faisant retour dans la réalité »
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« La structure du site clive amour et haine. On aime ou on hait, mais jamais les deux en même temps. Ces deux notions existent au sein du même site mais de se rencontrent pas, ou alors dans des échanges qui tournent au règlement de compte »
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« Cette e-conflictualité est appelée par le dispositif qui induit une place de voyeur : la vue est toujours sollicitée par le texte et les images. Quand le facebookien n’est pas actif, il regarde. Une jeune fille raconte comment son petit ami l’a quittée sans chercher d’explication car il est tombé sur une photo d’elle un peu trop proche d’un autre garçon. Aucune explication n’a été audible : c’était là, la photographie fait preuve. L’image relance le pulsionnel et le sexuel et c’est dans un renversement radical que fait retour le pendant de cet amour universel »
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« Les adolescents affectionnent ce site car il facilite les échanges avec les pairs, en dehors du regard parental mais aussi des contraintes du corps et du face à face avec l’autre. La menace de l’autre sexe est mise à distance (…) »